Il
était difficile de faire un titre plus programmatique que Parmi
nous, c'est exactement ça, pendant une demi-heure, Clément
Cogitore est parmi les migrants à qui il laisse le centre du film,
le jeune cinéaste est au milieu d'eux, la caméra à leur niveau, ni
trop près ni trop loin, ni vraiment documentaire ni tout à fait
fictionnelle, Parmi nous promet un immersion et il la donne. D'où ce
nous si péremptoire, définitif, radicalement différent d'un parmi
eux.
Le
lieu où tout cela se déroule n'est pas nommé avec précision, mais
on le devine rapidement, la frontière nord de la France, à quelques
encablures de l'Angleterre, cette terre promise dont tous ces jeunes
gens parlent. Cette zone est littéralement sous la caméra de
Clément Cogitore une jungle. Ils vivent là au milieu des arbres
dans des abris de bric et de broc, on a du mal à les nommer des
abris de fortune, la litote est trop forte.
Il
ne sera pas non plus dit de quel contrées, de quels pays, de quelles
régions ils viennent, la langue n'est pas reconnaissable. Mais tous
se comprennent, comme s'ils savaient précisément quel est leur but,
leur dessin. Eux-mêmes semblent revêtir un uniforme, plutôt des
habits difformes, ces joggings, sweaters, ces k-ways, des vêtements
passe-partout, presque des tenues de camouflage dans lesquelles ils
espèrent passer inaperçus.
Rarement
les migrants n'ont été filmés pour eux-mêmes dans le cinéma
français. La plupart du temps une pointe – souvent insupportable
d'ailleurs – de misérabilisme vient culpabiliser le spectateur.
Car toujours le migrant est comparé avec l'autochtone, avec le Blanc
qui souhaite l'aider, l'accueillir ou au contraire le rejeter
(regardons l'affreuse Palme d'or 2017 The Square de Ruben
Östlund pour voir à quel degré de complaisance le migrant est
filmé).
Clément
Cogitore choisit une autre manière, plus sombre pour filmer ses
personnages, il filme le groupe, la stratégie pour fuir, puis
l'individu et la peur de sa faire attraper par les flics. La
construction dramatique repose sur une angoisse sourde qui emprunte
au slasher au fur et à mesure que les compagnons de fuite du
personnage principal (Murat Subasi) disparaissent du champ, du cadre,
de la jungle le laissant finalement seul au monde.
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