Ça
circule pas mal en voiture dans The Dead don't die et chaque fois, à
chaque trajet, on entend la même chanson country dans l'autoradio.
« c'est la chanson du film » dit Bill Murray au volant à
Adam Driver. Ici, ce sont les acteurs et non les personnages qui
discutent de ce morceau de Sturgill Simpson, le quatrième mur est
tombé sans qu'une mise en abyme se développe (contrairement au film
japonais sorti en avril Ne coupez pas), mais plus tard dans le film
on apprendra que Adam Driver connaît la fin du scénario, Jim lui a
donné à lire alors que Bill Murray n'a eu que ses scènes.
Ils
semblent être les seuls à avoir conscience d'être dans un film et
reprennent vite leurs personnages, Ronald (Driver) et Cliff (Murrya)
vite rejoints par Mindy (Chloë Sevigny). Ils sont trois policiers
dans la ville de Centreville, 738 habitants et beaucoup de morts,
comme on le découvrira plus tard. Les premières minutes dessinent
la topographie de la ville, un peu comme dans un film de Frederick
Wiseman, des plans d'ensemble des lieux importants puis des
discussions entre les habitants typés, tel l'emite (Tom Waits) ou le
bouseux qui soutient Trump (Steve Buscemi).
Parce
que le premier zombie arrive au bout d'une demi-heure, c'est Iggy Pop
qui sort d'une tombe au nom de Samuel Fuller, Jim Jarmusch distille
quelques éléments cinéphiles en présentant les habitants de la
ville imaginaire, par exemple ce jeune vendeur de bédés, un geek
(Caleb Jones), homme à la pâleur effrayante et qui porte un t-shirt
à l'effigie de Nosferatu, comme un prolongement du film de vampires
de Jim Jarmusch, Only lovers left alive avec Tilda Swinton, elle
aussi blanche comme un mort.
Sans
doute parce que Adam Driver connaît le scénario, son personnage se
permet d'avancer dans le récit à grande enjambées et de vite
déclarer que les morts vivants, « the undead », sont des
zombies. Alors que le gouvernement affirme que les rumeurs sont
infondées sur les zombies, que la planète n'a pas changé d'axe,
mais le jour et la nuit sont inversés, la lune se colore de violet
et les morts sortent de leur tombe. Il faut maintenant que chacun des
vivants apprennent à dézinger à coups de pelle, fusil ou sabre les
undead, à séparer la tête du reste du corps.
Une
fois la topographie bien enregistrée pour le spectateur (trois lieux
principaux, le restaurant, la boutique de bédés, le commissariat,
puis trois lieux moins centraux, le motel, la ferme et le centre de
détention pour ados, il faut déployer les groupes de personnages.
Cela fonctionne aussi en trio, en l'occurrence trois trios, comme
dans une conjonction magique de chiffres, les trois flics aux noms
qui se terminent en -son et qui portent tous des lunettes, comme un rappel au film précédent de Jim
Jarmusch Paterson où trois sens étaient donnés dans le
film.
Suivent
trois jeunes gens, des citadins qui se trimbalent dans une Pontiac
qui fait penser à une bagnole d'un film de George Romero dit Ronald,
dans un petit hommage au cinéaste du film de zombies. On découvre
aussi trois adolescents dans ce centre de détention. Il ne sera
jamais dit pourquoi ces trois jeunes sont là et ils se sauveront dès
que les zombies attaquent leur centre. Le film les laisse en plan au
bout d'un moment alors que les trois jeunes gens en Pontiac sont
sauvagement trucidés par les zombies, ils le méritaient ces
hipsters pédants.
La
lenteur du film est celle des zombies qui reprennent ce rythme
alangui, cette hésitation régressive dans leur geste les
caractérise, ils reproduisent, tels des clichés ambulants, ce
qu'ils aimaient le plus quand ils étaient vivants (Iggy Pop en
souvenir de son sketch pour Jim Jarmusch veut du café). Ce n'est
qu'au bout d'une heure que les undead viennent ravager les
vivants et tout devient petit à petit complètement foutraque, Jim
Jarmusch sort du carcan du genre, là est la bonne nouvelle du film
mais qui déçoit ceux qui voulaient voir ce qu'ils ont déjà vu
cent fois dans un film de zombies.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire