Avec
The Doom generation, Gregg Araki se lance un petit défi un
peu crétin : faire un film hétéro. Il inscrit cela dans un
carton du générique « a heterosexual moie by Gregg Araki »
comme il inscrivait au début de Totally fucked up « another
gay movie by Gregg Araki ». Deux garçons, une fille et deux
possibilités, pas plus, la fille avec un garçon l'un après
l'autre. Le reste est du pur jus du cinéaste, moins rugueux que son
film précédent, plus abordable, plus conventionnel parfois.
Nos
trois personnages ont tous un nom de couleur. Bleu, blanc et rouge,
les trois couleurs du drapeau américain (et aussi de plein d'autres
pays, bien entendu). Le film marque la deuxième apparition de James
Duval dans l'univers coloré et délirant du cinéaste, l'acteur avec
son petit sourire en coin toujours semblant gêné par ce qui lui
arrive, les cheveux mi-longs comme on en portait il y a 25 ans.
James
Duval est le moteur du récit pourtant son personnage n'est pas celui
qui conduit la voiture, il s'appelle Jordan White. La conductrice est
Amy Blue (Rose McGowan), coiffure à la Louise Brooks, jeune femme
rebelle typique des films du cinéaste, toujours dans le contrôle de
sa colère. Après avoir été dans une boîte de nuit, ils croisent
sur le parking Xavier Red (Johnathon Schaech), variation du cow-boy
ultra sexué.
Le
jeu de séduction commence dans ce trio avec cette ambition de
tourner autour du désir, de la sensualité, du sex appeal entre eux.
Le film s'amuse avec le trash (Welcome to Hell lit-on), un couteau
comme symbole phallique en guise de moyen de se rencontrer pour la
première, une bagarre avec des chaînes et ça se poursuit dans la
bagnole d'Amy où les corps se dénudent petit à petit et les
regards se croisent langoureusement.
Jordan
et Xavier, appelé X par le premier parce qu'il ne sait pas prononcer
son prénom en entier, trop compliqué pour son cerveau fatigué
(James Duval joue à la perfection l'abruti drogué) se retrouvent
régulièrement tous seuls dans des positions où leurs lèvres se
rapprochent, s'effleurent mais jamais ne se toucheront. Ce pari
initial d'hétérosexualité, Gregg Araki le triture jusqu'au bout du
périple qui passe par toutes les couleurs.
C'est
sous la forme d'un road movie que le film avance et que le trio
croise la lie de la société américaine. Des néo nazis dégénérés
qui dessinent des croix gammées rouges sur leur torse, des
commerçants sur-armés qui dégainent au moindre souci, chaque fois
le trio achète de la bouffe et le prix est le même 6,66$.
Bouillonnant et imparfait, ultra référencé Nouvelle Vague, The
Doom generation lançait la météorite Gregg Araki.
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