C'est
étonnant de voir Kurt Russell dans une comédie burlesque de Robert
Zemeckis. Il n'était pas encore tout à fait le héros des films de
John Carpenter et restait encore un acteur de télévision (juste
avant ce film, il avait joué Elvis Presley sur le petit écran pour
John Carpenter). Rudy Russo, tel est son nom, est un vendeur de
bagnoles d'occasion. D'occasion, il faut le dire vite, ce sont des
vieux tape-culs, des épaves qu'il retape comme il peut, il modifie
le compteur, il rafistole le pare-choc avec du chewing-gum.
Son
bagout est censé faire l'affaire. Quand il harponne un éventuel
client, il fait preuve d'une tchatche incomparable. Sa méthode est
simple, il parle très vite, très longtemps, sans laisser à sa
proie le temps de réfléchir. Il demande toujours le nom du
potentiel acheteur. S'il s'appelle O'Hara, Rudy se présente comme un
O'Brien, un latino débarque, il se nomme alors Garcia, deux Noirs
sont là, il est Rudy Washington Carter. Avec son costume bon marché,
il arbore un sourire constant censé plaire aux gogos qui mordent à
l'hameçon.
Rudy
bosse pour Luke Fuchs (Jack Warden). Il a deux collègues, un autre
vendeur Jeff (Gerrit Graham) et Jim le mécanicien (Frank McRae). Le
premier est superstitieux au dernier degré, par exemple il refuse
catégoriquement de vendre des voitures rouges (ça servira plusieurs
fois dans l'histoire), le second est franchement timbré. Le patron
est aussi un original, il ne se déplace jamais sans son chien,
prénommé Toby, sans le doute l'être vivant le plus malin du film,
le cabot va chercher les outils dans la caisse pour son maître quand
il répare les bagnoles.
Les
40 premières minutes de Used cars sont centrées sur la
rivalité entre Luke Fuchs et le vendeur de voitures neuves qui se
trouve juste de l'autre côté de la rue. Or, cette concession
automobile est tenue par Roy L. Fuchs (Jack Warden également) le
propre frère de Luke. Deux frangins qui se détestent et pour qui
tous les coups sont permis comme disait Tricatel dans L'Aile ou la
cuisse. Piquer le client, faire une pub en volant l'antenne de la
retransmission d'un match de football américain ou faire une soirée
promo encore plus alléchante.
Ces
40 premières minutes vont vite, c'est un burlesque décontracté et
infantile, même quand Luke Fuchs meurt d'une crise cardiaque et
qu'il faut cacher le corps. Il sera enterré dans une voiture juste
derrière la magasin. Roy se doute bien de quelque chose, il a vite
compris que son frère n'est plus là, même si Rudy clame qu'il est
parti en vacances à Miami Beach. Roy ne serait pas mécontent du
décès de Luke, il hériterait de son magasin. Une grosse magouille
(pour reprendre le titre français) se profile, une autoroute doit
être construite ici et Roy veut empocher le pactole.
Rudy
ne veut pas que ce soit vendu pour une raison simple, il se prend une
bonne marge sur les ventes. Il a but mégalomaniaque, devenir
sénateur. Il vit dans une caravane. Dès qu'il rentre dans son doux
logis, il met sur son lecteur de cassette « Hail to the
chief », il nettoie avec application une photo de la Maison
Blanche qui trône juste à côté de son affiche de campagne « Vote
Senator Russo ». Il semble le seul à le croire, un parfait
tocard et Kurt Russell est parfait dans son personnage de raté
irrécupérable.
L'arrivée
de Barbara (Deborah Harmon), la fille de Luke Fuchs à la moitié du
film lance le récit vers encore plus de magouilles et développe
quelques personnages bien bas de plafond. Le plus incroyable est ce
juge (Al Lewis) qui accuse Barbara d'escroquerie. Sur le bureau de
son tribunal on découvre des miniatures de chaise électrice,
potence et guillotine. La scène finale consiste en une longue
traversée de bagnoles cabossées, en piteux état, aux pots
d'échappement défaillants conduites par des gens qui n'ont pas le
permis. J'ai beaucoup ri.
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