vendredi 19 octobre 2018

La Vie de Brian (Terry Jones, 1979)

L'essentiel du comique et de l'humour de La Vie de Brian se noue autour du langage. Prenons la première scène, la naissance de Brian dans une étable. Les trois rois mages débarquent avec l'encens, l'or et la myrrhe. Leur tenue comme leurs paroles sont dignes d'un film biblique ou d'un péplum mais dès que la mère de Brian (Terry Jones) s'adresse à eux, c'est immédiatement un autre discours qui se fait entendre. Avec une voix sur-aiguë, cette mère utilise une langue de la rue, une logorrhée vulgaire que les rois mages ont bien du mal à comprendre. Ils quittent l'histoire pour se rendre à une autre histoire, celle de Jésus, celle du cinéma biblique.

Pour l'instant, ce sont les derniers jours de Brian (Graham Chapman) que le film raconte, en 33 après JC, un samedi après-midi comme le dit un carton. Plutôt que la vie c'est la mort de Brian qui est en marche dans cette Jérusalem occupée par les Romains avec Ponce-Pilate (Michael Palin) comme gouverneur. Pilate se voit affligé d'un défaut de prononciation (il ne peut pas prononcer les R) et son ami centurion Bigus Dickus (Graham Chapman) zozote. Plusieurs longues scènes répétitives sont dédiées à ce comique de langage que seul un public anglophone (en l'occurrence la foule au parvis de son palais) peut apprécier.

Ceci étant le meilleur gag du film consiste à une erreur de langage. Brian s'est engagé dans la résistance aux Romains. Il a comme mission d'inscrire sur le mur du palais « Romains rentrez chez vous » en latin. Romanes Eunt Domus écrit-il quand un décurion en colère débarque (joué par John Cleese), au lieu de le mettre en prison, il lui tire les oreilles en lui faisant reprendre les déclinaisons et la conjugaison. Souvenir de nombreux collégiens qui trimaient avec le latin avec des professeurs intransigeants sur les règles à apprendre par cœur. Il doit désormais copier 100 fois Romani Ite Domum pour avoir massacrer le latin sous la surveillance de deux légionnaires.

Politique et religion sont les deux mamelles des derniers jours de Brian. S'il a écrit cette phrase, c'est qu'il a rejoint un groupe de résistance aux Romains, le Front du Peuple de Judée. Ils n'ont pas d'autres ennemis que les Romains, à part le Front populaire de Judée et le Front judéen du peuple. Bref, là est mis à plat le morcellement des groupes politiques émergeant tout autant que les palabres incessantes (ils discutent puis votent des motions au lieu d'agir) mais aussi l'écriture inclusive avec le personnage d'Eric Idle qui souhaite désormais qu'on l'appelle Loretta car cela serait plus démocratique.

La religion est présente à de multiples moments inspirée par la période des premiers temps chrétiens. D'abord avec quelques facéties sur la lapidation interdite aux femmes mais où ce ne sont que des femmes qui viennent jeter des pierres, elles portent toutes des fausses barbes, un tel gag étant présent déjà dans Sacré Graal (la pendaison de la sorcière). Puis Brian est pris pour le Messie et le nombre de ses partisans ne cessent de croître, débitant tout un tas d'inepties (la sandale, la gourde deviennent des reliques et des objets de culte). C'est une critique facile mais assez amusante de l'endoctrinement.


Dernière évocation du langage dans La Vie de Brian, les deux chansons, celle du générique de début de film, toujours avec l'animation de Terry Gilliam (qui dans le film ne joue que le bourreau crétin), est un pastiche des chansons des James Bond, sauf que les paroles ont pour but de ridiculiser Brian. La chanson finale chantée par Eric Idle (Always look at the bright side of life) tandis que tous les acteurs se font crucifiés est le moment le plus anthologique du film qui résume bien la contradiction entre le sérieux de la situation (la crucifixion) et la légèreté des paroles comme une parodie sarcastique de Jésus Christ Superstar sorti quelques années plus tôt. 
























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