L'essentiel
du comique et de l'humour de La Vie de Brian se noue autour du
langage. Prenons la première scène, la naissance de Brian dans une
étable. Les trois rois mages débarquent avec l'encens, l'or et la
myrrhe. Leur tenue comme leurs paroles sont dignes d'un film biblique
ou d'un péplum mais dès que la mère de Brian (Terry Jones)
s'adresse à eux, c'est immédiatement un autre discours qui se fait
entendre. Avec une voix sur-aiguë, cette mère utilise une langue de
la rue, une logorrhée vulgaire que les rois mages ont bien du mal à
comprendre. Ils quittent l'histoire pour se rendre à une autre
histoire, celle de Jésus, celle du cinéma biblique.
Pour
l'instant, ce sont les derniers jours de Brian (Graham Chapman) que
le film raconte, en 33 après JC, un samedi après-midi comme le dit
un carton. Plutôt que la vie c'est la mort de Brian qui est en
marche dans cette Jérusalem occupée par les Romains avec
Ponce-Pilate (Michael Palin) comme gouverneur. Pilate se voit affligé
d'un défaut de prononciation (il ne peut pas prononcer les R) et son
ami centurion Bigus Dickus (Graham Chapman) zozote. Plusieurs longues
scènes répétitives sont dédiées à ce comique de langage que
seul un public anglophone (en l'occurrence la foule au parvis de son
palais) peut apprécier.
Ceci
étant le meilleur gag du film consiste à une erreur de langage.
Brian s'est engagé dans la résistance aux Romains. Il a comme
mission d'inscrire sur le mur du palais « Romains rentrez chez
vous » en latin. Romanes Eunt Domus écrit-il quand un décurion
en colère débarque (joué par John Cleese), au lieu de le mettre en
prison, il lui tire les oreilles en lui faisant reprendre les
déclinaisons et la conjugaison. Souvenir de nombreux collégiens qui
trimaient avec le latin avec des professeurs intransigeants sur les
règles à apprendre par cœur. Il doit désormais copier 100 fois
Romani Ite Domum pour avoir massacrer le latin sous la surveillance
de deux légionnaires.
Politique
et religion sont les deux mamelles des derniers jours de Brian. S'il
a écrit cette phrase, c'est qu'il a rejoint un groupe de résistance
aux Romains, le Front du Peuple de Judée. Ils n'ont pas d'autres
ennemis que les Romains, à part le Front populaire de Judée et le
Front judéen du peuple. Bref, là est mis à plat le morcellement
des groupes politiques émergeant tout autant que les palabres
incessantes (ils discutent puis votent des motions au lieu d'agir)
mais aussi l'écriture inclusive avec le personnage d'Eric Idle qui
souhaite désormais qu'on l'appelle Loretta car cela serait plus
démocratique.
La
religion est présente à de multiples moments inspirée par la
période des premiers temps chrétiens. D'abord avec quelques
facéties sur la lapidation interdite aux femmes mais où ce ne sont
que des femmes qui viennent jeter des pierres, elles portent toutes
des fausses barbes, un tel gag étant présent déjà dans Sacré
Graal (la pendaison de la sorcière). Puis Brian est pris pour le
Messie et le nombre de ses partisans ne cessent de croître, débitant
tout un tas d'inepties (la sandale, la gourde deviennent des reliques
et des objets de culte). C'est une critique facile mais assez
amusante de l'endoctrinement.
Dernière
évocation du langage dans La Vie de Brian, les deux chansons,
celle du générique de début de film, toujours avec l'animation de
Terry Gilliam (qui dans le film ne joue que le bourreau crétin), est
un pastiche des chansons des James Bond, sauf que les paroles ont
pour but de ridiculiser Brian. La chanson finale chantée par Eric
Idle (Always look at the bright side of life) tandis que tous les
acteurs se font crucifiés est le moment le plus anthologique du film
qui résume bien la contradiction entre le sérieux de la situation
(la crucifixion) et la légèreté des paroles comme une parodie
sarcastique de Jésus Christ Superstar sorti quelques années
plus tôt.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire