« I'm
so tired of being good ». Cette lycéenne de 1954 à Baltimore,
Maryland, qui est fatiguée d'être gentille s'appelle Allison (Amy
Logane), elle fait partie des Square (les coincés dans les
sous-titres). Ce jour-là quand débute Cry-Baby, c'est
vaccination pour tout le lycée, moyen très simple pour John Waters
de présenter tous les personnages d'adolescents de son film. Allison
se retrouve à côté de Cry-Baby (Johnny Depp), leader des Drapes
(les rebelles). Leur destin est lié avec ce premier contact, ce
premier regard où le visage de Cry-Baby est transfiguré par une
fine larme qui coule de son œil gauche.
Hairpsray
était un film sur des danseurs amateurs de Rhythm & Blues,
Cry-Baby est une comédie musicale avec des chansons de
Rockabilly. On chante, on danse, on se roule des patins dans une
taverne de bric et de broc tenue par la grand-mère de Cry-Baby, une
rockeuse qui montre les dents, une dure à cuire tout en cuir
moulant, la dénommée Ramona Rickettes (Susan Tyrell). Elle vit en
couple avec l'oncle de Cry-Baby, Belvedere (Iggy Pop). Sa première
apparition est dans un baquet en train de se laver, hommage aux
livres de beefcake que John Waters lisait, en cachette, dans
le Baltimore de sa jeunesse.
Premier
film sans Divine, Cry-Baby voit l'arrivée d'une nouvelle
troupe d'acteurs. Traci Lords, ancienne actrice porno (par ailleurs
recherchée par la police pour avoir été dans l'industrie du X
avant ses 18 ans) est Wanda. Sa mère (Patty Hearst) s'occupe de
faire traverser les élèves devant le lycée, son père (David
Nelson) est conducteur de bus. Tous les deux sont toujours très
souriant, l'air benêt, quand Wanda tire toujours la tronche, elle a
honte d'eux, ils sont pourtant les plus compréhensifs du film. Les
autres parents des Drapes sont en contrepoint avec la vie que mènent
leurs enfants.
Les
parents de Milton (Darren Burrows) sont des chrétiens évangélistes.
Joe Dallessandro est le père et Joey Heatherton la mère, amusant
quand on connaît leur passé cinématographique, il se déshabillait
chez Paul Morrissey, elle était une blonde atomique. Ils viennent
prêcher la bonne parole devant le lycée. Milton sort avec Mona (Kim
McGuire) surnommée « gueule cassée », parangon d'Edith
Massey actrice des premiers films de John Waters. Maquillée
outrageusement, Mona a des parents atypiques : sa mère jouée
par Mink Stole a une scène, allongée dans un lit et clope au bec et
son père est Troy Donahue, acteur de films de délinquants
juvéniles, autre inspiration du cinéaste.
Pour
compléter la troupe, qui se compose comme une famille qu'ils se sont
choisi, voici Pepper (Ricky Lake), la petite sœur de Cry-Baby.
Pepper est enceinte de 8 mois et a déjà deux enfants. Pepper est la
première à remarquer que Allison en a assez d'être gentille et se
verrait bien entrer dans le gang des Drapes, elle est une Square tout
ce qu'il y a de plus conformiste avec sa petite jupe drapée. Sa
grand-mère Madame Vernon-Williams (Polly Bergen) veut tout faire
pour éloigner sa petite-fille de ces blousons de cuir (au col relevé
comme les rebelles le faisaient) et l’alpague dans sa décapotable
dès la sortie des cours.
L'affection
de John Waters est pour les Drapes. Il filme les Square, les coincés,
comme une unité où les individualités sont abolies. Eux aussi
chantent et dansent mais à côté des tenues colorées, sexy et
bariolées des Drapes, les Square portent uniformément leurs petites
chemises blanches et leurs vestes étriquées. Madame Vernon-Williams
organise un concours de talent (formellement interdit à Cry-Baby) où
Allison tout comme le groupe vocal de son petit-ami Baldwin (Stephen
Mailer). Ils chantent des morceaux qu'on croirait sortis d'une
comédie de Dori Day, l'horreur !
Baldwin
pour reconquérir le cœur d'Allison, désormais dévolu à son
rocker, détruit la belle moto de Cry-Baby tout en parvenant à faire
le mettre en prison (le maton est joué par Willem Dafoe, il demande
aux prisonniers de prier pour Nixon et Eisenhower). Baldwin fier
d'avoir créer cette injustice, après tout les Drapes sont forcément
coupables, va parader dans une danse rétrograde jusque chez Allison,
avec une fanfare comme au bon vieux temps. Les rétrogrades face aux
modernes, l'éternel combat des personnages du cinéma de John
Waters.
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