vendredi 15 mai 2020

E.T., l'extra-terrestre (Steven Spielberg, 1982)

Chacun son enfance, la mienne s'est faite sans E.T., je n'ai découvert le film, en salle projeté en 35mm à la Cinémathèque de Grenoble, qu'à 30 ans. C'était la version originale de 1982 pas celle reformatée par Steven Spielberg pour améliorer quelques mouvements de sa créature extra-terrestre et pour remplacer les fusils des agents du FBI qui poursuivent les enfants par des talkies-walkies, sur ce point ça me va, je déteste les armes à feu.

J'ai toujours trouvé que ET était moche à regarder avec sa tête d'étron. Comme dans Rencontres du troisième type, il ne s'agit pas de jouer sur un suspense concernant son aspect. Certes dans la séquence d'ouverture, de nuit, on ne fait que le deviner l'extra-terrestre court à travers les arbres pour échapper aux hommes qui l'ont repéré. On n'en voit que quelques membres, à nous de reconstituer le puzzle de s'en faire une idée.

Si je l'avais vu enfant, j'aurais été comme Elliott (Henry Thomas) curieux de découvrir ce qui se cache dans la cabane à outils au fond du jardin. Dans son petit pyjama blanc, armé d'une torche, il observe et attend. C'est presque Lillian Gish sur son fauteuil à bascule dans La Nuit du chasseur auquel le film fait parfois penser, ET sort en claudicant de la cabane, il fait presque la même taille que l'enfant. Elliott tombe de sa chaise.

Et comme tout le monde l'avait bien remarqué, ET ce sont la première et la dernière lettre du prénom d'Elliott, ils sont liés par la pensée, cela sera montré assez subtilement dans le film, sans trop appuyer sur les échanges de pensée, cela commence quand ET est laissé seul dans la maison alors que Elliott est à l'école. ET découvre son environnement, boit de la bière et c'est l'enfant qui subit l'ivresse de l'extra-terrestre.

Cela a des avantages certains, il faut bien le dire, cela décoince Elliott notamment avec sa jeune camarade pour laquelle il a une affection d'enfant. A la télé, dans la maison ET regarde L'Homme tranquille, la scène de l'orage où John Wayne va embrasser Maureen O'Hara dont les cheveux sont emportés par le vent. Elliott reproduit ce geste romantique suggéré par l'extra-terrestre. C'est très beau et très drôle dans le même temps.

Mais ces échanges de pensée cachent la grande détresse affective dans laquelle vit Elliott. Car ET n'est rien d'autre qu'un ami imaginaire pour tous les autres membres de sa famille, tant qu'il cache la créature. La famille n'est pas idéale. Ses parents sont séparés, sa mère (Dee Wallace) est débordée, son grand frère Michael (Robert MacNaughton) n'est pas tendre avec Elliott qu'il humilie avec ses amis du lycée. La famille est décomposée et la vie n'est pas simple.

Les adultes sont peu présents. Outre la mère débordée, le prof de bio avec ses grenouilles à disséquer, on ne remarque que le personnage falot de Peter Coyote qui affirme avoir vécu la même expérience que Elliott. Tous les autres adultes sont des silhouettes, des flics et des scientifiques en combinaison blanche. Aucun d'eux ne veut comprendre la relation entre le jeune garçon et l'extra-terrestre.

Elliott avait attiré dans la maison ET avec des sucreries au chocolat. Dans son confinement, ET ne mange que de la junk food. C'est tout ce qu'il trouve dans le frigo. Elliott découvre l'extra-terrestre en allant chercher la pizza commandée, nourriture bien meilleure que ce que prépare sa mère selon le grand frère. Dans l'unique scène de repas, vite interrompue par les discussions sur ce « gobelin » vu par Elliott, on voit que personne n'a vraiment envie de manger.

L'ami imaginaire cesse d'exister quand Michael, le grand frère et Gerties (Drew Barrymore) la petite sœur découvre l'extra-terrestre. Chacun aura un petit rôle dans le récit. Pour Gertie, c'est une partition comique, composée d'abord d'un éventail de quiproquos (les glissements de ET dans le salon, la mère ne le verra jamais trop occupée à ranger les courses). Gertie dit toujours la vérité mais comme souvent personne ne l'écoute.

Pour Michael c'est la partie action ce qui veut dire se déplacer en BMX à travers la ville pour semer les voitures du FBI qui les poursuivent. Lui qui était si rétif à accepter que Elliott ait vu un extra-terrestre doit bien admettre qu'il avait raison. Michael et Gertie aident donc à exfiltrer l'extra-terrestre de la surveillance de la police l'après-midi d'Halloween, ET est déguisé en fantôme avec un drap, direction la forêt originelle pour contacter l'espace intersidéral.

On découvrait ET pataud et gauche. Il apprend l'anglais très vite et il a des pouvoir non seulement télépathiques comme on l'a vu mais aussi de télékinésie. Il peut déplacer les objets, d'abord des balles de pâte à modeler pour figurer son système solaire mais aussi pour élever le BMX d'Elliott, déguisé en Dracula, à travers les airs et ainsi passer devant la lune au dessus de la forêt. Voilà pour l'image la plus iconique du film.


J'ai beau avoir découvert le film à 30 ans et le voir une deuxième fois 19 ans plus tard, je suis complètement happé par le personnage de Elliott. Tout le finale est bouleversant, Steven Spielberg manipule parfaitement nos émotions, les fait virevolter à l'image du gamin qui vole dans les airs (là est son vrai hommage à Peter Pan) avant de frôler lui comme ET. On le savait qu'ils n'allaient pas mourir, qu'ils ne pouvaient pas mourir.






























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