mercredi 12 février 2020

Le Maître d'école (Claude Berri, 1981)

Dans Le Maître d'école, on entend l'un des morceaux les plus bondissants et sautillants de Richard Gotainer, Le Sampa. La chanson vient deux fois, en tout premier lieu pour présenter Gérard (Coluche) et Charlotte (Charlotte de Turckeim) sur leur lieu de travail, une boutique à la mode américaine en plein milieu de Paris. Ce jour-là Gérard se fait virer comme un malpropre par son patron, un gros connard qui avait giflé un gosse qui avait piqué des santiags.

Alors qu'ils devaient se marier au début de l'été (ça viendra en fin de film, qu'on se rassure et au bal ils danseront devant Gotainer et son groupe sur cette même chanson manière de boucler la boucle), voilà Gérard au chômage. Claude Berri se sent obligé, avec beaucoup de maladresse, d'expliquer comment un type qui vend de fringues se retrouve instituteur suppléant : il a le bac, il a fait une année de droit. Il n'en suffit pas plus pour convaincre l'inspecteur d'académie.

La présentation de l'école primaire en pleine banlieue (un bâtiment moderne sans âme), du directeur débonnaire (Jacques Debary), de ses deux collègues Mademoiselle Lajoie (Josiane Balasko), prof dépressive et Monsieur Meignant (Roland Giraud), prof à cheval sur les principes et des élèves se fait en même temps avec grande rapidité. Il s'agit de purs personnages de bande dessinée et le film va poursuivre dans une voie de gros traits, l'essence même du caricaturiste.

Dans Le Vieil homme et l'enfant, il y avait quelques scènes dans l'école où le jeune réfugié avait cours. Ces scènes étaient dénuées de tout enseignement. Dans Le Maître d'école, c'est pareil. Gérard de donne pas franchement des cours, le film tourne autour des leçons de choses. Il parle des grands thèmes de l'époque quand la campagne présidentielle de 1981 irriguaient toutes les conversations : le chômage, la peine de mort, l'homosexualité.

Devant Coluche, il y a toute une assemblée de bambins qui causent de ces thèmes. Je ne sais pas dans quelle mesure les enfants improvisent leurs réponses aux questions de Coluche où ils ont répétés les dialogues de Claude Berri, mais cela donne un instantané où les différents opinions sont exprimées. Cela a un côté micro-trottoir avec pour but de faire évoluer les mentalités des écoliers (et Coluche y parvient avec facilité).

Le fils du maire (intouchable, le directeur crève son ballon et a peur des représailles), une fillette dont les parents divorcent, un grand timide, un grande gueule, les élèves ont tous leur petit caractère, leur singularité. Claude Berri esquisse des portraits simples mais chaque fois une constante : on entend parler des parents mais on ne les voit jamais. Une raison à cela, Gérard est leur parent de substitution, leur adulte préféré.

« Lajoie, rabat-joie » gueulent les gamins à la cantine quand Mademoiselle Lajoie arrive pour manger. Les élèves ne l'aiment pas elle, alors elle déprime. Elle n'écoute pas les chansons joyeuses de Gotainer mais des tam-tams. « J'en peux plus des tam-tams » dit-elle à Gérard dans une ultime tentative pour le draguer. Son personnage incarne à elle toute seule le mal-vivre des enseignants et leur conséquence directe : les arrêts maladie.


Mais comme le film commençait avec une chanson, il se termine en chanson, dans la joie et la bonne humeur par le mariage de Charlotte et Gérard à la fin de l'année scolaire (j'aime beaucoup comment Jacques Debary) danse au mariage. Si j'aime autant ce film si caricatural mais si vif, c'est que j'avais le même âge que ces enfants au tournant de 1981, je me reconnais en eux. Et il faut l'avouer, le film me fait souvent rire.
























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