Dans
Le Maître d'école, on entend l'un des morceaux les plus
bondissants et sautillants de Richard Gotainer, Le Sampa. La chanson
vient deux fois, en tout premier lieu pour présenter Gérard
(Coluche) et Charlotte (Charlotte de Turckeim) sur leur lieu de
travail, une boutique à la mode américaine en plein milieu de
Paris. Ce jour-là Gérard se fait virer comme un malpropre par son
patron, un gros connard qui avait giflé un gosse qui avait piqué
des santiags.
Alors
qu'ils devaient se marier au début de l'été (ça viendra en fin de
film, qu'on se rassure et au bal ils danseront devant Gotainer et son
groupe sur cette même chanson manière de boucler la boucle), voilà
Gérard au chômage. Claude Berri se sent obligé, avec beaucoup de
maladresse, d'expliquer comment un type qui vend de fringues se
retrouve instituteur suppléant : il a le bac, il a fait une
année de droit. Il n'en suffit pas plus pour convaincre l'inspecteur
d'académie.
La
présentation de l'école primaire en pleine banlieue (un bâtiment
moderne sans âme), du directeur débonnaire (Jacques Debary), de ses
deux collègues Mademoiselle Lajoie (Josiane Balasko), prof
dépressive et Monsieur Meignant (Roland Giraud), prof à cheval sur
les principes et des élèves se fait en même temps avec grande
rapidité. Il s'agit de purs personnages de bande dessinée et le
film va poursuivre dans une voie de gros traits, l'essence même du
caricaturiste.
Dans
Le Vieil homme et l'enfant, il y avait quelques scènes dans
l'école où le jeune réfugié avait cours. Ces scènes étaient
dénuées de tout enseignement. Dans Le Maître d'école,
c'est pareil. Gérard de donne pas franchement des cours, le film
tourne autour des leçons de choses. Il parle des grands thèmes de
l'époque quand la campagne présidentielle de 1981 irriguaient
toutes les conversations : le chômage, la peine de mort,
l'homosexualité.
Devant
Coluche, il y a toute une assemblée de bambins qui causent de ces
thèmes. Je ne sais pas dans quelle mesure les enfants improvisent
leurs réponses aux questions de Coluche où ils ont répétés les
dialogues de Claude Berri, mais cela donne un instantané où les
différents opinions sont exprimées. Cela a un côté micro-trottoir
avec pour but de faire évoluer les mentalités des écoliers (et
Coluche y parvient avec facilité).
Le
fils du maire (intouchable, le directeur crève son ballon et a peur
des représailles), une fillette dont les parents divorcent, un grand
timide, un grande gueule, les élèves ont tous leur petit caractère,
leur singularité. Claude Berri esquisse des portraits simples mais
chaque fois une constante : on entend parler des parents mais on
ne les voit jamais. Une raison à cela, Gérard est leur parent de
substitution, leur adulte préféré.
« Lajoie,
rabat-joie » gueulent les gamins à la cantine quand
Mademoiselle Lajoie arrive pour manger. Les élèves ne l'aiment pas
elle, alors elle déprime. Elle n'écoute pas les chansons joyeuses
de Gotainer mais des tam-tams. « J'en peux plus des tam-tams »
dit-elle à Gérard dans une ultime tentative pour le draguer. Son
personnage incarne à elle toute seule le mal-vivre des enseignants
et leur conséquence directe : les arrêts maladie.
Mais
comme le film commençait avec une chanson, il se termine en chanson,
dans la joie et la bonne humeur par le mariage de Charlotte et Gérard
à la fin de l'année scolaire (j'aime beaucoup comment Jacques
Debary) danse au mariage. Si j'aime autant ce film si caricatural
mais si vif, c'est que j'avais le même âge que ces enfants au
tournant de 1981, je me reconnais en eux. Et il faut l'avouer, le
film me fait souvent rire.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire