Décompresser.
C'est le conseil que donne sa secrétaire à Walter (Bruce Willis)
col-blanc d'une quelconque entreprise publicitaire californienne. Il
se réveille la tête dans le cul, file enfiler son costume sans
prendre de douche, noue sa cravate sur une chemise à carreaux et
court à sa réunion. Il a veillé jusqu'à 3 heures du matin pour
finaliser son projet. Ce qui n'est pas le cas de son collègue, bien
apprêté, sourire hollywoodien mais qui, lors de cette réunion de
travail, affirme que l'ordinateur a eu un souci et qu'il ne peut pas
le présenter.
Le
patron félicite ce collègue inconséquent et critique Walter pour
sa tenue mal fagotée. Mais il peut se rattraper au restaurant en
présence d'un client japonais conservateur (on dit que sa femme est
très soumise) et pour faire bonne figure, Walter doit venir avec une
femme. Son carnet d'adresse étant obsolète, il se tourne vers son
frère, vendeur de bagnoles, et sa belle sœur qui trouvent une femme
seule pour ce soir-là. La perle rare s'appelle Nadia (Kim Basinger),
unique conseil de la belle sœur : ne pas la faire boire.
S'ils
étaient restés sobres, Blake Edwards aurait terminé son film au
bout de 10 minutes. Mais Nadia accepte de boire deux flûtes de
champagne. Walter avait peur qu'on lui envoie un laideron et c'est
dans l'obscurité qu'il découvre Nadia avant qu'une lampe ne vienne
dévoiler sa charmante silhouette et son beau visage. Voilà comment
Walter célèbre ce rendez-vous improvisé (le blind date du titre
américain), avec quelques bulles de champagne avant de retrouver son
patron, son collègue et le client japonais.
Une
robe rouge, voilà de quoi déclencher l'étincelle qui mettra le feu
aux poudres pendant la première heure de Boire et déboires. La
scène de restaurant fait un clair hommage à la fois à The Party
(la perruque de la Japonaise remplace le volatile) et à Victor
Victoria (le serveur récalcitrant). Nadia, complètement soûle,
brise tout ce qui se trouve sur son chemin : d'abord le bouquet
de fleurs cossu, ensuite la poche de la veste de Walter, enfin le
mariage du riche Japonais avec son épouse (hilarant hiatus sur les
avocats californiens qui sautent sur ce divorce).
A
la limite, la soirée aurait pu se terminer ainsi mais Blake Edwards
ajoute un troisième larron dans cette débandade, David Bedford
(John Larroquette), l'ancien petit ami de Nadia. Il croise Walter et
Nadia lors d'un vernissage aux peintures très sexuelles, un peu
avant le restaurant. Nadia a déjà un peu picolé mais reste digne.
David lui ne sait pas rester digne et s'empresse, dans sa jalousie
maladive qui consiste à protéger à outrance Nadia, contre sa
volonté, de prendre en défaut Walter. Physiquement, c'est déjà
drôle car David est encore plus grand que Walter.
Il
a beau porter un nœud papillon, David reste un grand gamin, comme à
peu près tous les personnages de Boire et déboires. Nadia
est son jouet et il refuse que Walter joue avec. David révélera
plus tard qu'il dort encore avec son doudou lorsqu'il se retrouve
chez ses parents, le père est juge, la mère passe son temps à
jouer au golf. David joue à emboutir les décors avec sa voiture
(surtout les vitrines des magasins, running gag), mais aussi la
bagnole de Walter, un tacot blanc, l'un des accessoires important du
film.
Les
déboires accumulés au cours de cette soirée concentrée sur une
heure de film auraient dû dégoûter Walter, mais non, après un
passage par la case prison et devant le juge, il ne renonce pas à
Nadia et entend bien empêcher le mariage arrangé avec David. La
dernière partie du film est axée sur une théâtralité plus
classique, portes qui claquent, chien méchant, corps qui chutent (à
cause des balles de golf, à cause de la rambarde d'une terrasse).
C'est moins drôle que ce qui a précédé mais ça reste très
drôle. Enfin, Walter peut décompresser au bord de l'océan.
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