Pour
raconter le début de Jupiter
ascending, il serait possible
de dire que c'est l'histoire d'une fille qui a fui la Russie de sa
mère pour vivre dans les USA de son père et qu'adulte elle nettoie
les chiottes des gens friqués jusqu'à ce qu'elle rencontre un type
qui débarque en volant et qui lui dit qu'elle est la réincarnation
d'une reine issue d'une galaxie très lointaine et qu'elle doit
récupérer son trône pour sauver la planète Terre qui est menacée
de destruction par de puissants ennemis, par ailleurs membres de sa
famille extraterrestre.
Je
pourrais raconter tout le film des Wachowski à la manière de
l'Odieux Connard, avec sarcasme et ironie mordantes, comme par
exemple me moquer de ces abeilles qui encerclent Jupiter (Mila Kunis)
parce qu'elles la reconnaissent comme une reine. Ça me rappelle Paul
Préboist dans La Belle
histoire quand il faisait
pleurer Marie-Sophie L. d'émotion avec ses histoires d'abeilles. Les
Wachowski et Lelouch, c'est du pareil au même, d'ailleurs j'appelais
leur précédent film Cloud
Lelouch Atlas.
Les
deux films traînent le même discours amphigourique sur le destin à
travers les mondes, le temps et les sexes (les genres), mais entre
Cloud Atlas
et Jupiter ascending,
les Wachowski ont appris à filmer les corps de leurs acteurs, et je
parle bien des hommes, tels ceux qui jouent dans la série Sense
8. Ils ont appris à aimer
filmer les peaux et scruter la sensualité. Aucune raison
scénaristique n'est donnée pour que Caine, joué par Channing
Tatum, reste pendant 20 minutes torse nu. Sa combinaison était
déchirée après une bagarre.
Il
l'enlève, là Stinger (Michael Biehn) reconnaît la reine qu'est
Jupiter, mais Caine ne pense pas à chercher un t-shirt. C'est alors
qu'arrivent les mêmes adversaires et quelques aliens peu ragoûtants,
et Caine se bat contre eux, filant en volant grâce à ses souliers
magiques et s'accroche comme il peut, toujours à moitié nu, sur la
navette qui vient de capturer Jupiter. Dans Crazy
stupid love, Emma Stone
ordonnait à Ryan Gosling de ne pas se rhabiller, lui aussi restait
sans raison torse nu pendant 10 minutes, pur et délicieux caprice de
voyeurisme des cinéastes.
C'est
finalement assez habile et pour tout dire plutôt admirable de se
dire que certains cinéastes puissent encore avoir l'idée de mettre
le récit sur pause, de prendre le temps de se faire plaisir (et
j'imagine faire plaisir à de nombreux spectateurs). La semi-nudité
de Channing Tatum dans un film de science fiction intergalactique,
c'est le meilleur antidote contre les armures et costumes des héros
X-Men ou Marvel, à l'exception notable de Deadpool
(la bagarre de Ryan Reynolds nu) et des Gardiens
de la galaxie, deux très bons
films par ailleurs.
Mais
les Wachowkski poussent les ambiguïtés sexuelles plus loin avec le
personnage de Eddie Redmaine. Il incarne Balem, l'un des héritiers
Abrasax, famille qui domine l'univers et qui compte moissonner la
Terre (j'adore cette idée scénaristique). Balem, avec ses moues
boudeuses, sa voix nonchalante éraillée, ses poses Vogue (la danse
du clip de Madonna, pas le magazine), c'est bien simple, Balem est un
drag queen
qui vient de sortir d'une folle nuit. Et quelle folle tenue il
porte ! Une veste qu'il porte à même la peau, ornée de
paillettes, et un collier tout en dorure. Tout cela n'est-il pas une
bonne raison de regarder et redécouvrir Jupiter
ascending ?
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