dimanche 29 septembre 2019

Le Cri de la hyène (Chan Chuen, 1983)

Voilà un cas typique de ce que l'industrie du cinéma de Hong Kong pouvait produire de plus indigent. Depuis le milieu des années 1970, après la mort de Bruce Lee, Jackie Chan est la star du cinéma d'arts martiaux. Il a galéré, tourné dans des navets pas possibles, souvent réalisés par Lo Wei, il a trouvé enfin sa voie (grâce à Yuen Woo-ping) puis il s'est mis avec bonheur à la réalisation avec La Hyène intrépide sorti en 1978. Il faut le rappeler Le Cri de la hyène n'est pas la suite de La Hyène intrépide, il joue seulement sur le titre pour attirer le gogo.

Depuis sa première réalisation, Jackie Chan a largement progressé, il a peu à peu abandonné le cinéma de kung-fu pour se lancer dans la comédie d’action. En 1983, Lo Wei – en tant que producteur – sort Le Cri de la hyène en mettant Jackie Chan en tête d’affiche. Seulement voilà, la star s’était fâché avec Lo Wei, il avait quitté le tournage. Cela n’a pas empêché ce vieil escroc de continuer son film en faisant jouer Jackie Chan par un autre acteur grimé. Que Jackie ne ressemble plus en 1983 à ce qu’il était en 1977, au moment du tournage, n’est même pas un problème pour le producteur.

Faire jouer un seul personnage par deux acteurs, pourquoi pas. Le sosie qui porte une moustache ou une barbe, un chapeau ou une perruque réussit à peu près à se battre. Il imite la gestuelle si particulière de Jackie Chan, sa manière de se déplacer, la façon dont il bouge dans un angle à 90° son visage plus vite que ses cheveux (son personnage a des cheveux longs), la position arquée exagérée de ses jambes. On le sait tous, Jackie Chan c’est d’abord un physique reconnaissable entre tous, une coiffure abondante et un peu rebelle et son sourire comme sa bonne bouille, surtout à ses débuts.

Mais comme l’avait Robert Clouse dans Le Jeu de la mort 2 avec Bruce Lee, Lo Wei utilise des morceaux d’anciens films de Jackie Chan pour palier son absence. On le voit pécher les grenouilles et une anguille dans Le Chinois se déchaîne. Pire que cela, le combat final entre le super méchant (Yen Shi-kwan) et Jackie est celui de La Hyène intrépide avec comme modification au montage la suppression des dialogues entre les deux hommes et l’ajout du personnage de Tung le paresseux (Austin Wai) qui, comble du foutage de gueule, est celui qui met fin aux jours du méchant, manière peu élégante de Lo Wei de se venger.

Car l’autre moyen pour faire du Cri de la hyène un long métrage à durée classique est d’y introduire un personnage dans une intrigue parallèle. Ce sera Tung que l’on découvre chez lui, couché dans son lit, tirant sur des leviers pour faire venir les objets à lui (bouffe, pot de chambre, etc) sans avoir à bouger le petit doigt. Il se lie avec Grenouille, un trompe la faim, qui a des dettes et qui trouve refuge dans la maison de Tung. Ils vont former un duo comique qui repose sur leur opposition physique (l’un grand et beau gosse, l’autre nerveux et vilain).

Le souci dans ce film est que Lo Wei galère pour trouver un scénario pour que Jackie et Tung se rencontrent enfin. Le récit est rempli d’incohérences encore plus mis en avant par le festival de faux raccords. On se croirait dans un navet de Godfrey Ho. A vrai dire, raconter l’histoire du Cri de la hyène n’est pas nécessaire. Décrire les personnages vaut tout récit. Ainsi les deux supers méchants qui cherchent à éliminer les pères de Jackie et Tung sont affublés de grandes capes rouge et bleu et leurs rires sardoniques préviennent tout le monde qu’ils sont d’affreux jojos.


Ils sont accompagnés de quatre gardes vêtus d’uniforme doré qui accentuent le côté ridicule du film. Je ne précise pas qu’on n’y croit pas du tout. Jackie Chan avait choisi de ne pas inclure de personnage féminin dans La Hyène intrépide. Lo Wei introduit une protagoniste (Pearl Lin) qui ne sert à rien sinon montrer une femme. Et je finirais avec la scène entre Dean Shek et Jackie où ce dernier se fait moquer de son physique par le premier. J’ignore si les dialogues ont été faits après le départ de l’acteur, telle une revanche supplémentaire pour le ridiculiser, mais ça en a tout l’air.


















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