La
route est sinueuse pour entrer dans ce village qu'est Bacurau. Nous
sommes au Brésil dans un futur proche qui ressemble comme deux
gouttes d'eau au Brésil d'aujourd'hui ou d'avant hier, on est très
loin de la côte océanique encore plus loin de l'Amazonie,
finalement les deux seuls endroits de ce pays continent que l'on
connaît et en plus on nous trimballe dans un véhicule pas très
confortable où ça tangue. Donc ce futur proche mais pas si éloigné
n'a pas apporté de considérables changements de mode de vie.
On
apprend dans la discussion entre le chauffeur et son passager que le
village souffre d'un problème d'eau. D'ailleurs, le camion citerne
qui arrive dans le village s'est fait tiré dessus et dans cet
endroit l'eau est encore plus nécessaire compte tenu du climat sec,
la photographie décrit avec rudesse l'atmosphère qui va devenir de
plus en plus étouffante. Le jour c'est du jaune soufre, une lumière
éblouissante et la nuit, c'est le noir absolu avec une menace qui
commence à troubler la tranquillité des habitants.
Bacurau
n'existe plus, elle est devenu un no man's land, la commune n'est
plus indiquée sur la carte routière. Dans cette disparition future,
il y a quelque chose de Heureux comme Lazzaro dans Bacurau,
dans cette coupure avec le temps, non pas le passé mais le futur
mais cette fois la communauté, les habitants du village que l'on
découvre petit à petit avec l'arrivée de Teresa (Barbara Collen)
malgré ce regard caméra angoissé de Domingas (Sonia Braga) sont
unis mais inquiets de ce qui se passe.
Ce
qui se passe est l'arrivée à toute vitesse d'un couple de motards.
Leur aspect, leur tenue aux couleurs vives jure dans les herbes et le
sable du lieu, leur démarche lente amène l'idée d'un western. Ils
observent le village, sa population, tout autant qu'ils sont
observés. C'est le début d'une chasse qui va s'engager dans
quelques minutes entre ces hommes qui causent anglais et ces
brésiliens qui partent se réfugier dans un minuscule musée,
allégorie d'une civilisation que ces anglophones veulent détruire.
Le
village n'est pas uni, c'est le moins qu'on puisse dire, des vieilles
rancunes font surface dans les discussions, des rivalités vont
réapparaitre. Bacurau ne présente pas un peuple uni, une
sainte communauté, c'est plutôt l'inverse mais ils vont devenir
s'unir contre les rapaces qui commencent à tournoyer autour de leur
village, ce sont des drones envoyés par les chasseurs pour pratiquer
leur safari. Ce sont deux civilisations qui s'affrontent avec des
moyens dérisoires d'un côté. La guerre est déclarée.
L'arrivée
de Udo Kier au milieu du film est une excellente surprise, c'est même
un bonheur d'autant que le film se transforme petit à petit dans
cette forme rétro-futuriste en slasher politique. Les deux cinéastes
réussissent dans Bacurau ce qu'avaient tenté et raté
Jessica forever (peu de spectateurs ont vu le film, ça va
être dur de comparer). Voilà le bon film de ce début d'automne qui
méritait autant la Palme d'or que Parasite avec qui il a
beaucoup en commun, ce désespoir joyeux, cette vivacité
incomparable. Pourvu que Bucarau ait le même succès.
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