mercredi 25 septembre 2019

Bacurau (Kleber Mendoça Filho & Juliano Dornelles, 2019)

La route est sinueuse pour entrer dans ce village qu'est Bacurau. Nous sommes au Brésil dans un futur proche qui ressemble comme deux gouttes d'eau au Brésil d'aujourd'hui ou d'avant hier, on est très loin de la côte océanique encore plus loin de l'Amazonie, finalement les deux seuls endroits de ce pays continent que l'on connaît et en plus on nous trimballe dans un véhicule pas très confortable où ça tangue. Donc ce futur proche mais pas si éloigné n'a pas apporté de considérables changements de mode de vie.

On apprend dans la discussion entre le chauffeur et son passager que le village souffre d'un problème d'eau. D'ailleurs, le camion citerne qui arrive dans le village s'est fait tiré dessus et dans cet endroit l'eau est encore plus nécessaire compte tenu du climat sec, la photographie décrit avec rudesse l'atmosphère qui va devenir de plus en plus étouffante. Le jour c'est du jaune soufre, une lumière éblouissante et la nuit, c'est le noir absolu avec une menace qui commence à troubler la tranquillité des habitants.

Bacurau n'existe plus, elle est devenu un no man's land, la commune n'est plus indiquée sur la carte routière. Dans cette disparition future, il y a quelque chose de Heureux comme Lazzaro dans Bacurau, dans cette coupure avec le temps, non pas le passé mais le futur mais cette fois la communauté, les habitants du village que l'on découvre petit à petit avec l'arrivée de Teresa (Barbara Collen) malgré ce regard caméra angoissé de Domingas (Sonia Braga) sont unis mais inquiets de ce qui se passe.

Ce qui se passe est l'arrivée à toute vitesse d'un couple de motards. Leur aspect, leur tenue aux couleurs vives jure dans les herbes et le sable du lieu, leur démarche lente amène l'idée d'un western. Ils observent le village, sa population, tout autant qu'ils sont observés. C'est le début d'une chasse qui va s'engager dans quelques minutes entre ces hommes qui causent anglais et ces brésiliens qui partent se réfugier dans un minuscule musée, allégorie d'une civilisation que ces anglophones veulent détruire.

Le village n'est pas uni, c'est le moins qu'on puisse dire, des vieilles rancunes font surface dans les discussions, des rivalités vont réapparaitre. Bacurau ne présente pas un peuple uni, une sainte communauté, c'est plutôt l'inverse mais ils vont devenir s'unir contre les rapaces qui commencent à tournoyer autour de leur village, ce sont des drones envoyés par les chasseurs pour pratiquer leur safari. Ce sont deux civilisations qui s'affrontent avec des moyens dérisoires d'un côté. La guerre est déclarée.

L'arrivée de Udo Kier au milieu du film est une excellente surprise, c'est même un bonheur d'autant que le film se transforme petit à petit dans cette forme rétro-futuriste en slasher politique. Les deux cinéastes réussissent dans Bacurau ce qu'avaient tenté et raté Jessica forever (peu de spectateurs ont vu le film, ça va être dur de comparer). Voilà le bon film de ce début d'automne qui méritait autant la Palme d'or que Parasite avec qui il a beaucoup en commun, ce désespoir joyeux, cette vivacité incomparable. Pourvu que Bucarau ait le même succès.

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