samedi 6 avril 2019

J'veux du soleil (Gilles Perret & François Ruffin, 2019) + La Lutte des classes (Michel Leclerc, 2019)


Refaire le monde avec le sourire, voilà la meilleure définition que j'ai trouvé sur les internets sur le feel good movie. Cette semaine on en a deux exemples avec La Lutte des classes et J'veux du soleil. Deux trublions du cinéma français en tête, ici ce cher Edouard Bear toujours aussi lunaire, rockeur dans l'âme, auteur d'une chanson sobrement intitulée « J'encule le pape », il incarne dans le quatrième film de Michel Leclerc un éternel rebelle de gauche incapable de se rendre compte qu'il est devenu un petit bourgeois insupportable. Là François Ruffin, le poil à gratter picard qui monte dans son véhicule utilitaire (attention message subliminal) avec Gilles Perret pour partir à la rencontre des gilets jaunes autour des ronds-points (et pas dans les manifs du samedi après-midi).

Chaque film a une mission. Au début de J'veux du soleil, sur l'air de Douce France de Charles Trenet (la chanson sera plus loin entendue dans sa version Carte de séjour), on en tend politiques et éditorialistes parler d'esprit facho chez les gilets jaunes. François Ruffin veut prouver que c'est faux. Il n'a pas vraiment pas de mal à le prouver, aucun gilets jaunes qu'il rencontre ne se déclare facho. Il croise même un Kamel. CQFD. Tout le début de J'veux du soleil est construit autour de cette mise en scène naïve (François sort de sa bagnole, traverse la route et passe quelques minutes avec eux). Il a un effet apaisant, il écoute, il amuse (il fait comme s'il était Macron), il console, François fait le show et les gens aime ça.

A qui parle-t-il vraiment ? Qui sont ces témoins qu'il rencontre et qui sont tous sympathiques, ouverts, pas fachos pour deux sous ? Est-ce qu'ils sont des électeurs de la France Insoumise ? A vrai dire la réponse est à trouver entre les lignes du dialogue. À l'un d'eux, François s'étonne qu'il se déclare « intérimaire en CDI ». Késaco demande le député ? On découvre là toute une frange de salariés qui ont cru aux sirènes de l'intérim et des primes à gogo vantés par les gouvernements au début du siècle et qui se retrouve dans la mouise aujourd'hui avec des dettes et des crédits. François veut ré-enchanter le monde et son film se termine d'ailleurs en comédie musicale dans un finale horripilant et cucul-la-praline.

Le finale de La Lutte des classes est dans ce même genre d'idée, il doit emporter le spectateur vers un au-delà du quotidien, ici une super héroïne qui grimpe les murs de l'école publique pour sauver les élèves. Le message doit être fort comme chez François Ruffin, il doit dire que c'est quand toutes les communautés sont unies qu'on peut avancer. Et pour Michel Leclerc, les communautés sont religieuses, chrétien, juifs et musulmans, tous ensemble pour défendre la laïcité et l'école publique face aux petits bourgeois pâles et sans aspérité qui foutent leurs gosses dans les écoles privées et catholiques, ici une école Saint-Benoît qu'Edouard Baer décrit comme l'enfer sur terre à son fiston qu'il a eu avec Leïla Bekhti.

La Lutte des classes joue sur la fable en poussant autant que possible le réalisme pour aller vers un monde qui vivrait isolé à Bagnolet le tout pour rire de tout avec tout le monde. Le film est fort plaisant, certes, on s'amuse bien, mais il est dépassé par son sujet, par ses sujets (religion, laïcité, école, éducation, mixité sociale, vie en banlieue) effleurés superficiellement sans jamais prendre parti. Reste Ramzy Bedia et son délirant personnage de directeur d'école qui parvient à inciter les élèves à aller voir un film en resquillant, grâce à une ruse redoutable, pour qu'ils ne traînent dans la rue. Pas grand chose à dire de plus sur le film qui se contente d'un structure narrative simpliste si ce n'est qu'on prend du plaisir à voir tous ces acteurs et actrices jouer si gaiement. En période de sinistrose aiguë au cinéma, ces petites choses sont bonnes à prendre.

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