lundi 7 mai 2018

The Party (Blake Edwards, 1968)

Somme toute, les gags de The Party ont une moindre importance, certains ont même beaucoup vieillis, (le film de Blake Edwards sort aux USA en mai 1968), que la mise en scène. Le formalisme esthétique de The Party tient en une formule toute simple : Hrundi V. Bakshi, que Peter Sellers joue avec douceur, est un personnage du cinéma muet égaré dans un film parlant. Certes Bakshi cause aux autres invités mais ce ne sont que des dialogues phatiques, de strictes répliques de convention débitées par un homme qui ne connaît personne à cette soirée.

Il s'est égaré chez les Clutterbuck par mégarde. Le producteur Geoffrey Clutterbuck (Stephen Liss) surnommé « le général » avait inscrit son nom sur une feuille de papier, non pas pour l'inviter comme le croyait sa secrétaire, mais pour le virer. Bakshi est figurant dans un film en costumes censé se dérouler en Inde. Après avoir ruiné la scène où il jouait de la trompette, il appuie sur le détonateur qui fait exploser le fort avant que le réalisateur de ce film ne lance le moteur de la caméra.

Cette séquence initiale annonce les déboires et catastrophes que va déclencher Bakshi chez ses hôtes. Il détonne dès son arrivée dans la propriété du général. Il débarque dans une minuscule automobile et se gare, tant bien que mal, entre deux grosses voitures luxueuses. En sortant, du cambouis se répand sur sa chaussure droite. Il décide de la nettoyer dans la fontaine mais sa chaussure tombe. Cette chaussure qui dérive sur l'eau (l'un des éléments clés du film) n'est pas qu'un gag en soi, elle permet de découvrir cette immense demeure.

L'entrée, le salon, la salle à manger, le patio, la salle de billard, la cuisine au rez-de-chaussée, les chambres à l'étage, Bakshi va tout visiter avec chaque fois de nouveaux invités auxquels il ne sait pas quoi dire, d'ailleurs personne ne semble le connaître, ni les maîtres du lieu ni les convives. La maison, traversée par cette fontaine horizontale, change d'aspect selon la guise de Bakshi qui a trouvé les boutons pour déplacer automatiquement le bar, les tables, autant d'objets amovibles qui perturbent la soirée.

La découverte des lieux prend une bonne demi-heure avant de passer au repas. Encore une fois, le burlesque est l'affaire du cinéma muet avec ce serveur qui ne cesse de boire les verres de whisky qu'il présente à Bakshi (ce dernier ne boit que de l'eau). Le serveur devient saoul comme un cochon mais doit cependant apporter les plats et servir le vin. La caméra suit les circonvolutions de notre ivrogne autour de la table avec de fréquents passages dans la cuisine où le majordome tente à plusieurs reprises de l'étrangler.

Bakshi est pratiquement aussi invisible auprès des invités qu'il est muet. Là encore, sa tenue est terne, un pantalon et une veste beiges quand tous les autres invités sont colorés, le noir et blanc contre la couleur. C'est précisément l'eau qui va transformer Bakshi en personnage visible, après ce repas chaotique, il cherche à aller faire pipi et le WC du rez-de-chaussée est occupé, il part donc visiter l'étage et casse la chasse, emplit la cuvette de PQ, ce qui provoque une belle inondation dans les WC de la chambre des Clutterbuck.

Tout trempé, il change de tenue et adopte un pyjama rouge vif. Il se fait enfin remarquer par Michèle Monet (Claudine Longet) apprentie actrice et chanteuse venue à cette soirée pour rencontrer le tout Hollywood. Bakshi n'arrêtait pas de tourner autour d'elle, sans oser lui parler, son passage à la couleur lui permet enfin d'entrer dans le même film qu'elle. Michèle passe aussi relativement inaperçue mais l'addition de ces deux corps sans réelle personnalité va modifier la tournure de la soirée.


Tous les éléments du film vont s'unir pour le grand finale. Un éléphant apporté par des hippies (la fille des Clutterbuck en est) va être lavé dans la fontaine (il est recouvert de peinture). Quand les meubles amovibles se déplacent, la demeure devient une immense piscine et le savon fait mousser le tout. Cette explosion de mousse est une réponse à la séquence finale des tartes à la crème de Dr. Folamour, séquence retirée par Stanley Kubrick. Blake Edwards la recrée pour Peter Sellers dans un délire burlesque et régressif et libérateur.


























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