Il
ne faut pas se fier à l'affiche aux couleurs chaudes (largement
inspirée de celle créée par Andy Warhol pour Querelle) en
encore moins à la bande annonce qui mise sur la présence des drag
queens exubérants et flamboyants. Corpo eléctrico fait
partie de ces films qui avancent lentement avec un scénario
minimaliste, appuyant sur l'aspect documentaire du métier des
protagonistes. Ici, Elias (Kelner Macédo), petit gars bien propre
sur lui, il vient d'arriver à São Paulo et travaille dans une usine
textile.
Le
jeune homme de 23 ans ouvre le film, allongé dans son lit, nu, un
joint à la bouche, il discute avec son mec du soir. La première
partie alterne les scènes de lit en plan fixe serré avec des
longues discussions de Elias avec ses plans cul et la découverte de
ses collègues dans l'usine textile en plan large. On comprend
qu'Elias est le nouveau bras droit de la patronne. On rencontre les
ouvriers et notamment Fernando jeune émigré de Guinée Bissau
qu'Elias s'empresse de dessiner dans son carnet de croquis.
Ce
qui ressort est moins la timidité d'Elias, sa douceur quand il
parle, son discret sourire, que sa grande solitude. Chaque repas avec
ses collègues, chaque pause est un moment de respiration. Tout à
coup, tout le monde se réunit dans la salle commune, chacun sort ses
sodas, ses gâteaux à la carotte ou le panettone, chacun discute de
tout et de rien, de son passé (Fernando envoie son salaire à sa
famille) de son futur peu reluisant. L'important est de ne pas penser
à retrouver son petit studio dans un quartier d'immeubles.
Dans
la construction de sa vie à São Paulo, il fait deux rencontres
totalement opposées. Arthur (Ronaldo Serruya ) et Wellington (Lucas
Andrade). Le « daddy » blanc et bourgeois et le « minet »
noir et pauvre. Il est attiré par ces deux pôles et plutôt que
choisir entre l'un et l'autre, il cherche à les faire se rejoindre.
Le DRH l'encourage à accéder à la bourgeoisie compte tenu de sa
position dans l'entreprise, il faut tenir son rang, ne pas se
mélanger entre classes sociales. L'idée du cosmopolitisme brésilien
est battu à froid.
Le
film sort de sa sinistrose quand Wellington présente un quatuor de
drag queens à Elias. Trois belles scènes éclatent tel un feu
d'artifice. La traversée de la ville en scooters illuminés sur un
adagio d'Haydn, un mariage païen d'un collègue d'Elias avec sa
petite amie toute en tendresse dans la villa d'Arthur en bord de mer,
là toutes les classes sociales se mélangent dans tous les sens du
terme. Entre les deux, une courte scène de pluie où les piétons
envahissent munis de parapluie la rue, accentuant la solitude d'Elias
au milieu de la foule en cette veille de Noël.
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