Tout
commence dans un lit. Voici Benny (Bene Coppersmith) réveillé en
sursaut par un coup de téléphone, ailleurs Claire (Abbi Jacobson)
qui espérait dormir un peu plus, mais son chat en a décidé
autrement, là Wendy (Tavi Gevinson) qui est déjà levée et en
train de faire son lit, enfin Ray (George Sample III) qui dort dans
le canapé de Benny. Dustin Guy Defa choisit la manière la plus
simple pour entamer Manhattan stories, cueillir ses
personnages au petit matin et les suivre toute la journée.
Etape
suivante, quitter leur domicile. Wendy est encore lycéenne ou
étudiante, en tout cas, elle vit chez ses parents. Coupe garçonne
très Jean Seberg, jamais un sourire, maigre comme un clou (son petit
déjeuner consiste à boire un jus de fruits), elle va rejoindre sa
meilleure amie qui elle veut retrouver son petit copain et présenter
un mec à Wendy. Les deux amies font l'école buissonnière. Elles
vivent dans les beaux quartiers, vers Central Park.
Claire
prend son vélo et quitte Brooklyn pour aller travailler à
Chinatown, dans le sud de Manhattan. Elle commence un nouveau boulot,
stagiaire dans un canard nommé New York News. Son patron (Michael
Cera), fan de death metal, la charge d'enquêter sur un
suicide suspect. En vérité, le patron du journal veut coucher avec
elle et il fait le mariole devant elle qui se rend vite compte que ce
boulot d'enquête où elle quémande des indices n'est pas fait pour
elle.
Benny
est le mec le plus positif de New-York, il encourage Ray a sortir de
sa torpeur. Ce dernier a fait un sale coup à sa copine, mis sur
Internet des photos dénudées. Ray déprime et n'ose plus sortir.
D'autant que le frangin de la petite amie a bien l'intention de lui
péter la gueule. Benny part sur son vélo (comme Claire) mais reste
à Brooklyn, son coup de fil lui avait annoncé une bonne nouvelle,
on lui propose d'acheter un vinyle rarissime de Charlie Parker.
A
cela, il faut ajouter un trio de petits vieux dans Chinatown. Jimmy
(Philip Baker Hall) est horloger. Il mène une vie lente et s'apprête
à réparer une montre qui va prendre une importance croissante. Il
reçoit la visite de deux de ses amis qui s'installent sur le porche
de sa petite boutique où les clients ne sont nombreux. Et ils
papotent. Pendant ce temps, Claire et son patron, en planque,
viennent poser des questions à Jimmy sur cette montre.
La
petite musique de ces histoires et de quelques autres est
entraînante. Ce sont des récits minimalistes, tout à fait dans
l'esprit du cinéma indépendant newyorkais actuel (Benny Safdie joue
un petit rôle dans l'histoire de Ray). Avec cette importance pour la
bienveillance vis-à-vis des personnages, une nonchalance narrative
appréciable. Les quelques coups de théâtre qui viennent mettre des
bâtons dans les roues (de vélo) sont donnés sur un ton comique.
L'esprit
choral du récit est assez vite balayé, il ne s'agit pas pour le
cinéaste de faire se croiser ses personnages s'ils n'ont pas de
raison de le faire. Ce qui va les lier est leur rapport à la loi et
au crime. Petit crime quand Benny comprend qu'il a été escroqué
(une course-poursuite en vélo délicieuse est mise en scène), gros
crime avec l'enquête de Claire, Wendy débarque sur le lieu d'un
meurtre et Ray a commis un acte peu charitable.
Il
faut signaler que le titre français du film Manhattan stories
est un peu bête (le titre original est Person to person) ne
serait-ce que parce qu'une moitié des histoires se déroule à
Brooklyn. Il faut aussi signaler la grande maîtrise du montage dans
le passage d'une histoire à l'autre, tout en harmonie, évidemment
comme je l'écrivais plus haut parce que le cinéaste rejette cette
idée du coup de théâtre et du lien forcé. Le film a été tourné
en 16mm ce qui confère ce joli grain cinéma.
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