Un
13 avril (1992?) à Los Angeles, l'un s'appelle Jon (Craig Gilmore),
l'autre s'appelle Luke (Mike Ditry), Jon Luke, hommage transparent à
Godard. Jon est critique de cinéma, dans l'entrée de sa maison, une
affiche de Made in USA est sur le mur, dans sa chambre quand
il écrit sur son ordinateur (le mot fuck à l'infini), il travaille
devant l'affiche de Nouvelle Vague. Pour son quatrième film,
très indépendant (comprendre : budget riquiqui), Gregg Araki
salue son confrère suisse. Il ponctue chaque scène (ou presque)
avec un cadre noir qui évoque autant le style de Godard des années
1980 que Flesh de Paul Morrissey.
Luke
est également confronté au cinéma, de manière totalement
différente, ni critique, ni spectateur, ni admirateur de Godard, il
rencontre quelques personnages issus de Hollywood. Beau gosse, Luke
décide de faire du stop torse nu, histoire d'attirer le chaland, il
se fait remorquer par deux lesbiennes qui l'aguichent avant de le
braquer avec un revolver, elles ont vu Thelma et Louise et ne
veulent pas se faire avoir comme avec Brad Pitt. Plus tard, il sera
menacé par trois loubards qui portent des t-shirts sur l'un est
écrit Sex lies and videotape, sur l'autre Drugstore
cowboy. Le cinéma indépendant de l'époque.
Gregg
Araki n'a jamais caché sa passion pour le cinéma mais The Living
end vaut pour bien autre chose. La rencontre entre Jon et Luke se
fait par hasard, ils se percutent, Jon conduit, Luke se jette sur le
clapot. Ils ne vont plus se quitter. Ce jour-là, quand commence
l'exosquelette narratif, Jon vient d'apprendre qu'il est séropositif.
Le médecin lui annonce, sur un ton badin, non sans avoir rappelé
qu'il faut se protéger, « vous la population à risque ».
Il va se faire consoler par son amie Darcy. C'est sur le chemin du
retour qu'il emboutit Luke, il le ramène chez lui. Luke dira à son
nouvel ami qu'il l'aimera jusqu'à la fin des temps.
« A
film is a gun and a girl », chez Gregg Araki, un film c'est un
flingue et deux mecs qui sont filmés le plus souvent possible à
moitié nu, comme des icônes érotiques. Luke imberbe porte son
blouson de cuir sur son torse nu, jean déchiré aux genoux, et il a
un flingue. Jon le vire aussitôt de chez lui et le regrette
immédiatement. Il va revenir et ils vont partir dans un road movie
minimaliste de Los Angeles à San Francisco. Ils font l'amour (ils
sont tous les deux séropo), ils saignent, ils se disputent, ils se
réconcilient. Ils se braquent au sens propre comme au figuré. C'est
très bancal, parfois superficiel, résolument viscéral, The
Living end était le premier film de Gregg Araki à sortir en
France.
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