Le
diable est une femme, tout un programme pour le septième et dernier
film de Josef von Sternberg avec Marlene Dietrich. 40 ans plus tard,
adapté du même livre de Pierre Louÿs, La
Femme et le pantin, Luis
Buñuel titrait son dernier film Cet
obscur objet du désir. Le
film procède d'une volonté de conclusion du personnage de femme
forte, dominatrice, libre tel que l'a joué sept fois Marlene
Dietrich, tantôt enfant gâté, tantôt femme fatale, toujours
metteur en scène de sa vie, évidemment c'est pour cela que l'art du
cabaret (L'Ange bleu,
Cœurs brûlés,
Vénus blonde
et La Femme et le pantin)
est au centre du récit, Marlene Dietrich chante deux chansons.
Pour
la première fois, un flash-back est utilisé pour raconter
l'histoire de Concha, jeune espagnole au début du siècle. Cela se
déroule pendant le carnaval de Séville et Josef von Sternberg met
les bouchées doubles, profusion de costumes, masques, serpentins et
confettis. Au centre du carnaval, Concha est la vedette dans un char,
assise au milieu de ballons gonflables, loup sur le visage. Elle
observe et se sait observée. En face, au milieu de la foule, loin ou
près, peu importe, un bel hidalgo croise ses yeux et cet homme,
Antonio (Cesar Romero), à la fine moustache la suit jusque chez
elle. Le film montrera que c'est Concha qui le précède et l'attire
dans sa toile.
Elle
lui donne rendez-vous plus tard, avec un petit sourire complice, sans
pour l'instant avoir encore montré son visage, encore caché par son
masque, mais aussi par la grille devant la fenêtre, autant
d'obstacles qu'elle ne cesse de mettre entre elle et les hommes. En
attendant, Antonio s'abrite dans un restaurant, il ne veut pas
croiser la police, dirigée par le Gouverneur Paquito (Edward Everett
Horton). Antonio est un révolutionnaire, un républicain, il risque
de se faire emprisonner. Dans ce restaurant, il tombe sur une vieille
connaissance, le capitaine Pasqual Costelar (Lionel Atwill) et lui
explique qu'il a rendez-vous avec la plus belle femme de Séville.
Don
Pasqual commence le long récit de sa vie avec Concha, pour être
plus précis, l'absence de vie intime avec Concha. Il la rencontre
dans une fabrique de cigarettes et contre un billet, il demande une
cigarette. Elle en confectionne deux, la seconde est destinée à
patienter. La patience, il ne reste que cela au capitaine. Concha
réclame de l'argent pour l'entretenir, elle et sa mère, Pasqualito,
comme elle le surnomme comme s'ils étaient dans une relation
adolescente, obéit en silence, renfrogne sa colère et elle le
laisse là pantois. Elle disparaît pendant des semaines et revient,
fraîche comme une fleur, Pasqual retombe dans son piège.
Concha
joue à l'enfant, comme le faisait Marlene Dietrich dans la partie
russe de Agent X-27,
une fillette capricieuse qui exige beaucoup de son bienfaiteur. C'est
sans doute dans La Femme et le
pantin que l'on trouve le plus
d'humour de tous les films du duo. Difficile de ne pas sourire et
d'être sidéré par son comportement égoïste quand elle nargue
Pasqual en invitant chez elle Morenito (Don Alvarado), jeune toréador
qui ne dira aucun mot pendant tout le film. Les mines boudeuses de
Marlene Dietrich suivent des regards pleins de passion sur ces hommes
qu'elle dompte, comme un combat de tauromachie, le film y fait
plusieurs fois référence.
La
maman de Concha n'est pas mal non plus pour manipuler son monde, tout
comme la « sorcière », comme la nomme Pasqual, la
patronne du cabaret où travaille Concha qui ricane à chaque phrase.
Pasqual va racheter son contrat pensant qu'il a enfin la main sur sa
belle. Il n'en sera rien, elle le mène encore et toujours par le
bout du nez. C'est la répétition des renvois de Pasqual qui est
drôle, ce que les hommes peuvent être idiots, mais jamais elle
n'embrassera ces idiots que sont Pasqual, Antonio et le gouverneur
Paquito dont on apprendra, avec grand étonnement, qu'il est lui
aussi l'un des amants de Concha. Elle est libre et sans hommes,
définitivement.
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