La
Daronne (Jean-Paul Salomé, 2019)
Madame
Hyde (Serge Bozon, 2017)
Isabelle
Huppert au cinéma, Isabelle Huppert à la télé. Je n'étais pas
allé voir Madame Hyde à sa sortie en mars 2018, vraiment pas
adepte du duo Roppert / Bozon, loin de là. Ici, Isabelle est
traductrice arabe français et vice-versa pour la police, là elle
est professeur d'électricité dans un lycée de la banlieue
lyonnaise. Effacée dans le deux cas, fiancée au commissaire
(Hyppolite Girardot), mariée à un homme au foyer (José Garcia),
elle mène une vie monotone jusqu'à...
Sans
la stupidité de tous ceux qui l'entourent, le récit de La Daronne
ne pourrait pas avancer. Pour déployer sa comédie, le film
fonctionne par soustraction : retrancher la vraisemblance et y
aller au forcing, enlever la suite logique des événements et
retirer la progression narrative du récit. Et ça marche, le film
est marrant et léger comme une bulle de savon ou une bouffée de
joint puisqu'elle devient dealeuse de cannabis.
Bernadette
Lafont le faisait dans Paulette, Isabelle Adjani dans Le
Monde est à toi. La délinquance pour le fun, le crime pour
rigoler, la drogue pour rire. Le modèle est la comédie américaine
genre Midnight run où ça ne fait jamais de pause. Mais ça
ressemble plus à certains films français des années 1990, ceux de
Jan Kounen, de Didier Le Pêcheur, de Graham Guit. Toute une époque
révolue (tant mieux) des enfants de Luc Besson.
Serge
Bozon fait l'inverse, il remplit son film comme un œuf. Madame
Hyde est un véritable catalogue : adaptation littéraire
modernisée, film banlieue, teen movie, comédie sur le mariage,
récit d'apprentissage, comédie musicale avec un rap très écrit,
variation sur Harold et Maude le tout développé dans un film
fantastique mâtiné de science-fiction avec beaucoup de science et
peu de fiction et parfois un peu d'horreur. Et je dois en oublier.
Mais
le plus étonnant est que Isabelle Huppert joue de la même manière
dans les deux films. Elle est d'abord un peu lente, atone, elle
observe, elle cherche à se faire respecter. Vainement. Sa voix est
molle puis quand la drogue lui tombe dans les mains ou que la foudre
lui tombe sur la tête, elle se transforme en un personnage de femme
forte, elle prend alors le pouvoir sur le récit qui jusque là la
dominait.
Quand
elle se met à mentir à ses mari/amant, à ses Arabes, sa voix est
aiguë. C'est un détail de jeu infime mais c'est le seul qu'elle
fournit dans ces deux films a priori totalement opposés, à deux
pôles contraires du cinéma français. Mais en fin de compte, ils
sont très proches. Suggestion : Isabelle Huppert devrait
proposer à Jean-Paul Salomé et à Serge Bozon de faire un film
ensemble, on ne serait pas forcément déçus.
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