Par
quoi commencer si ce n'est par le plaisir jamais éteint d'entendre
du cantonais dans une salle de cinéma. C'est que ça ne court pas
les rues les films de Hong Kong parlé en cantonais, même Tsui Hark
fait parler mandarin pour aller sur le marché chinois. Les premières
conversations sont entre Ip Man (Donnie Yen), son vieil ami Bob (Kent
Cheng) et son fils Ching (Ye He). Pas une discussion, une dispute sur
l'avenir du rejeton, féru de kung-fu mais que le paternel veut
envoyer à San Francisco pour faire ses études.
Le
maître des arts martiaux a appris qu'il est condamné, il a un
cancer de la gorge, son médecin lui conseille d'arrêter de fumer.
Ce qu'il fera est de prendre les devants, avec toujours ce grand
calme qui caractérise Ip Man et que Donnie Yen, que j'ai longtemps
pris pour un acteur inexpressif, sait parfaitement rendre à l'écran.
Voilà la raison pour laquelle Ip Man se rend en Californie en 1964.
le film commence d'ailleurs là-bas lors d'un gala de Bruce Lee
(Danny Chan) où le jeune comédien montre la valeur de son kung-fu.
Puis
le film entame un court flash-back avec l'arrivé comme un chien dans
un jeu de quilles d'un certain Billy (Simon Shiyamba) dans l'école
de kung-fu de Hong Kong. Lui, ce gigantesque Noir ne parle
qu'anglais, les élèves de Ip Man que cantonais. Ils manquent de se
castagner. Billy vient tout simplement remettre au sifu une
invitation lancée par son ancien disciple (il faut regarder les
précédents films Ip Man pour voir quels sont les relations
réelles ou fantasmées entre Ip Man et Bruce Lee). Pas de baston,
mais un refus poli du maître d'aller aux USA.
Et
pourtant, il s'y rend, le début du film en fait foi. Son intention
est avant tout d'avoir une lettre de recommandation du directeur du
Cercle Chinois de Californie, le maître Wan (Wu Yue). L'accueil est
glacial. Ip Man entre dans la pièce où sont assis tous les maîtres
d'arts martiaux, de différentes écoles, autour d'une table ronde.
Personne ne parle à Ip Man, puis les reproches fusent : Ip
soutient Bruce Lee qui veut diffuser le kung-fu en Occident. Pour Wan
et ses pairs, c'est une trahison. On remarquera que Wan parle
mandarin, la langue de Pékin.
Puis
il faut continuer par des combats d'arts martiaux, avec ce cher vieux
Yuen Woo-ping pour régler les chorégraphies. La première
confrontation entre Ip Man et Wan est plus visuelle que physique,
avec une table en verre qui tourne et chaque adversaire pousse de sa
main jusqu'à ce qu'elle se brise. Donnie Yen et Wu Yue ne seront pas
les seuls à se battre dans Ip Man 4 le dernier combat, au
contraire, la relève est là, Danny Chan un peu, Van Ness dans un
personnage de soldat de la marine puis tous les maîtres.
Dans
cette Californie de 1964, les racistes sont les adversaires. À
commencer par un certain Colin (Chris Collins) qui affirme que le
kung-fu ne vaut pas son karaté (il brise des moellons avec sa main),
puis le commandant de la marine Geddes (Scott Adkins), il commet
l'outrage de brûler le mannequin pour l'entraînement apporté par
Van Ness pour initier au kung-fu ses collègues de l'armée. On
discerne, sans finesse, une allusion aux croix enflammées par le Ku
Klux Klan pour effrayer les Noirs.
Enfin,
toujours avec de gros sabots, c'est la jeune fille de Wan, Yonah
(Wanda Lee), lycéenne et seule asiatique dans cet établissement qui
est la victime de la jalousie d'une de ses camarades de classe. Elle
vient d'être désignée capitaine de l'équipe de pom-pom girls mais
l'autre jeune fille l'agresse. Elle se plaint chez elle d'avoir été
agressée par Yonah. Grosse coïncidence (le scénario est bien
fait), le père de l'affreuse jalouse bosse au service d'immigration
et va aller se venger (autre coïncidence, le Billy du début est son
collègue).
Pour
terminer, je dirais qu'il y a des choses plaisantes et bien conçues
dans Ip Man 4 le dernier combat, un peu toujours les mêmes
choses, les combats et les décors. Wilson Yip n'a pas tourné son
meilleur film (ni le pire non plus, dans mon souvenir Ip Man 2
était bien plus raté), mais ce qui ne gêne le plus reste les
facilités scénaristiques et la lourdeur pour dénoncer les
racismes. J'aurais aimé un tantinet de subtilité. Qu'on se rassure,
les Chinois – cantonais comme mandarins – vont s'unir pour donner
une bonne leçon à ces affreux jojos qui les ont humiliés.
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