Travailler,
jamais ! C'est ainsi que le patriarche de la famille s'oppose à
toute tentative de salariat pour remédier à la pauvreté qui ronge
sa sœur, son fils Georges et l'épouse de celui-ci ainsi que sa
fille Françoise. Le père poursuit en clamant qu'ils sont une goutte
de paresse dans un océan de paresse. Sa sœur renchérit en
affirmant que cela fait quatre générations que cela dure. Mais le
dimanche, après la messe, cette famille de bigots ne peut pas se
réunir pour le déjeuner, chacun s'éparpille pour faire le
pique-assiette.
Bourvil
incarne ce Georges Lachaunaye, un adulte avec une tête d'enfant de
chœur et une coiffure de premier de la classe. L'acteur donne sa
voix la plus posée pour faire de son personnage un innocent qui va
avoir l'idée la plus étrange pour un bon catholique. Pendant qu'il
médite dans une église, la révélation divine lui vient. Il va
prendre de l'argent dans les troncs des églises. Cet argent
n'appartient à personne, donc Georges ne le vole pas. Sa famille,
loin de se poser des problèmes moraux, préfère cette activité à
un travail.
Habile
de ses mains, Georges doit s’entraîner à récupérer les pièces.
D'abord avec un caramel mou, puis avec une pince qu'il emprunte à
son ami Raoul (Jean Poiret) qui devient bientôt son assistant.
Chaque matin, Raoul et Georges font le tour des églises. L'épouse
de Georges leur prépare des bons casses-croûtes. Françoise, entre
deux cours à la Sorbonne, aide son grand frères à faire les
comptes. L'appartement des Lachaunaye, vide en début du film,
retrouve petit à petit ses meubles, ses tableaux, son faste d'antan
et son domestique.
L'affaire
bat son plein, et Jean-Pierre Mocky souligne avec ironie que cette
activité de Georges est encore plus prenante que s'il avait une
profession salariée. Car maintenant la police surveille les églises,
avec à leur tête un inspecteur que joue Francis Blanche avec ce
regard d'excité. Georges doit améliorer ses techniques et éviter
les policiers (joués par les acteurs habituels de Mocky, ces
troisièmes couteaux aux trognes inimitables). L'inspecteur et
Georges se croisent dans un café et sympathisent même, tant qu'ils
ne savent pas qui est l'autre.
La
saveur d'Un drôle de
paroissien tient dans
l'opposition entre les deux acteurs, Bourvil traverse les plans avec
une légèreté, sautillant à chaque pas, convaincu que cet argent
des quêtes lui est dû, Francis Blanche est au contraire pataud,
toujours en retard d'un coup, constamment humilié par l'échec de
chacun de ses plans. Le film frôle le surréalisme avec son côté
burlesque joué au premier degré avec ses dialogues brillants,
surréalisme qui trouve son apogée dans une séquence onirique en
couleurs dans ce film en noir et blanc.
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