mardi 5 janvier 2016

Kalo Pothi, un village au Népal (Min Bahadur Bham, 2015)

C'est le premier film népalais que je regarde. On est loin de Katmandou, au milieu d'un petit village où on annonce la venue du Roi, déchu depuis, après l'abolition de la monarchie et la prise de pouvoir par les maoïstes. Ceux qui attendent le souverain, ce sont les riches qui vivent dans une maison à étage. Les pauvres, eux, cherchent surtout à trouver un peu d'argent. Ils vivent dans la cave de cette maison des riches. En haut, Kiran le petit-fils du propriétaire et en bas, Prakash le fils de l'homme à tout faire.

Les deux enfants sont amis mais issus de deux classes différentes, le grand-père appelle Prakash et son père des intouchables, un mot que je croyais disparu. Les deux gamins vont à l'école ensemble (une école rudimentaire où ils apprennent l'anglais), s'amuse ensemble (avant que Prakash aide aux corvées) et décident d'élever une poule ensemble. Avec la poule, ils pourront faire commerce des œufs. Et avec l'argent, ils pourront aller voir le Bollywood qu'un colporteur doit projeter dans le village.

Comme dans un film d'Abbas Kiarostami, auquel on pense souvent, Kalo Pothi ne donne pas d'indications sur les personnages, le spectateur est plongé tête baissée dans le récit. Il faut prendre son temps, s'habituer au jeu des deux jeunes acteurs, remarquer les gestes nombreux qui se mêlent à la langue (un coup de pouce sous le menton veut dire qu'il ne ment pas). Ce qui est visible, c'est cette différence de classe sociale, appuyée par les vêtements des deux gamins, Kiran en occidental et Prakash en habit blanc traditionnel.

La poule ne va rester très longtemps chez Prakash. Son père la vend à un homme qui veut l'offrir à sa fille qui va se marier. Les deux gamins veulent récupérer leur animal. Leur quête va les conduire, tel l'enfant de Où est la maison de mon ami à travers les chemins à faire quelques bêtises (voler la poule et la mâchurer de noir dans l'espoir qu'elle ne sera pas reconnaissable). Le film prend la forme d'une fable amère. Le trajet permet à Min Bahadur Bham, qui signe son premier film, de filmer joliment quelques paysages.

Deux rêves de Prakash scindent le film en trois parties. Le premier rêve, filmé en plan séquence ralenti, montre l'enfant passant devant des bouddhistes, des hindouistes, des musulmans, des catholiques, des soldats réguliers et des miliciens maoïstes. Aucun d'eux ne semble s'intéresser à Prakash, à sa vie miséreuse et à sa tristesse. Ce rêve c'est la réalité affirme le cinéaste, et cette réalité prendra forme dans la dernière partie quand la guerre contre les maoïstes, que la sœur de Prakash a rejoint, redouble d'intensité.

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