dimanche 10 janvier 2021

J'ai aussi regardé ces films (mais pas au cinéma)

Petite fille (Sébastien Lifshitz, 2020)

Le témoignage exprimer de la douceur et de la violence. Sasha répond à sa mère que quand il sera grand il voudra être une petite fille. Le témoignage principal de Petite fille est celui de la mère de Sasha, elle trouve des mots très simples pour décrire ce bouleversement qui traverse sa famille (avec son mari elle a eu trois autres enfants). Face caméra, elle se demande ce qu'elle a bien pu faire pour que son fils soit une petite fille, prénom épicène, souhait d'avoir une fille quand elle était enceinte ? Elle culpabilise, pleure, se reprend mais continue son récit. C'est une Mère Courage qui doit affronter l'école, le proviseur et une professeure de danse russe qui ne veulent pas que Sasha soit une petite fille. La judicieuse proposition de mise en scène de Sébastien Lifshitz est de laisser toute la violence des « institutions » hors champ. Seuls des échos, des comptes rendus sont donnés, au fur et à mesure que Sasha confirme sa volonté de transition de garçon à fille. A vrai dire, je n'avais jamais vu film comme Petite fille à la fois didactique (on en apprend beaucoup sur le transgenre) et à suspense (le directeur de l'école va-t-il enfin accepter Sasha). Le film passe sur le site d'Arte jusqu'au 30 janvier.

Mank (David Fincher, 2020)

Il ne faut pas chercher dans Mank le travail du scénariste en cours, certes Houseman comme Orson Welles (barbu qui prépare ce qui aurait dû être son premier film Au cœur des ténèbres d'après Jospeh Conrad) lui donnent des instructions contradictoires, finir en 2 mois un script, et ce script arrivera en fin de film mais sans qu'on sache comment Herman Mankiewicz comment agence ce fameux scénario de Citizen Kane. Mieux que cela, David Fincher se lance un défi, prouver qu'Orson Welles n'a fait que filmer le scénario de Mankiewicz (jusqu'au plan finale avec la cérémonie des Oscars c'est ce qui est dit). Ce qui est sous-tendu dans ce discours qui fait comme si la mise en scène d'Orson Welles était banale (j'attends d'ailleurs un film où Shakespeare dira que Welles n'a fait que filmé platement Othello ou les aventures de Falstaff, ce serait une chouette parodie) est la vie hollywoodienne de Mankiewicz (les réunions à la MGM avec un Mayer plus abject que jamais – la scène où il demande à ses employés de baisser leur salaire), son amitié avec Hearst et Marion Davies (ah cette séquence de tournage avec Hearst qui fait un travelling sur une locomotive – voilà un vrai mégalomane), des discussions politiques (républicain donc corrompu ou démocrate donc progressiste – comment réduire le débat de manière si simple). A vrai dire le film est essentiellement composé de longues scènes de dialogues. Tout le monde s'exprime avec des bons mots (« Une alumette près de ta bouche te livrerait aux flammes » dit sa femme à Mankiewicz très soûl quand il veut une cigarette), des propos péremptoires, des piques bien senties. Comme d'habitude David Fincher empile ses éléments parce qu'il n'arrive pas à choisir, ce qui donne la séquence la plus pénible, Mankiewicz à un dîner mondain chez Hearst qui dégueule sa haine devant des invités déguisés en personnages de cirque (vous voyez la métaphore, Hearst fait son Barnum) avant que tous quittent la table (vous voyez le symbole, Mankiewicz est seul au monde). Sans doute la meilleure scène du film se situe quand Mankiewicz se tait, lors de la soirée électorale. Il a promis à sa femme de ne rien dire. Il n'y arrive pas et c'est reparti pour un long, très long, monologue. N'en jetez plus.


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