Pendant le confinement j'avais découvert quelques films de Bert Haanstra, cinéaste documentariste sur lequel rien n'avait jamais été écrit en France – faut dire aucun de ses films n'est sorti ici – pendant la période de couvre-feu, je me plonge dans les courts-métrages de Joris Ivens, compatriote contemporain du premier. Je ne sais pas s'il existe un gène du cinéaste hollandais, une aptitude particulière à filmer les rivières et canaux, en tout cas Miroir (récompensé à Cannes en 1950) et La Seine a rencontré Paris (récompensé à Cannes en 1958) tournent autour de l'eau.
Le court-métrage de Joris Ivens est plus prosaïque que celui de Bert Haanstra, dans sa première partie, il n'est pas encore à Paris, il filme les ouvriers et leur machine, les enfants des travailleurs de la Seine qui passent du temps sur les péniches. Travail, travail, menuise, menuise. Ce sont les gestes qui sont filmés, les mouvements des machines et les regards des mômes vers les grands. Personne ne parle, la nature elle-même est muette (eau et vent absents) ce qui s'entend est une musique mélancolique, un accordéon solitaire et les bruitages mécaniques.
On voit des choses qui sont devenues impossible à voir aujourd'hui (pas à cause du couvre-feu). On voit un homme boire de l'eau de la scène, on voit des enfants se baigner au beau milieu de Paris, on voit des chiens aller chercher la baballe dans l'eau, les pêcheurs trouvent des poissons. Est-ce à dire que l'eau n'était pas polluée en 1957 quand Joris Ivens ? Sans aucun doute. Il y avait aussi un peu moins de voitures. Des taxis dans une scène comique viennent déposer les magistrats sur les quais et ils remontent en enfilant leur robe vers le Palais de Justice.
Si Agnès Varda avait tourné ce film (elle a beaucoup filmé la Seine), elle aurait parlé de mise en Seine pour les visites du centre de Paris, sur les quais où les amoureux se reposent, se séduisent, se cajolent, sur les ponts où les gens passent, sur les digues où les mannequins se font photographier. Le mouvement est perpétuel mais calme, alangui, nonchalant, les gens se croisent. Le montage est très vif, on passe d'un cliché à un autre, de cette idée de bien vivre au bord du fleuve. Tiens, la musique est plus guillerette.
On évite de justesse la visite touristique, avec ce titre qui fleure bon le Sacha Guitry (Si la Seine nous était conté) et le textes de Jacques Prévert qui se terminent par du lyrisme pur (« il était une fois Paris, il était une fois l'amour », rien que ça). Le texte de Prévert est peu présent, quelques phrases groupées puis la musique reprend (sur l'air de Il était un petit navire), il est dit par Serge Reggiani. C'est un tout petit film,une trentaine de minutes en tout, un peu répétitif mais qui sait distraire à défaut de surprendre.
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