Troisième
volet de sa trilogie du duo amoureux après Plan
B et Absent
(même si je ne suis pas certain que Marco Berger ait envisagé ses
trois films ainsi), Hawaii
ne se situe pas dans l'état insulaire américain mais dans la
campagne argentine. Adieu la ville et bonjour une vieille maison
entourée d'un large jardin. C'est l'été (donc dans l’hémisphère
sud ils sont en plein mois de février), la piscine est prête pour
rafraîchir Eugenio (Manuel Vignau, celui qui imaginait le plan B).
Binoclard
brun, Eugenio est tout seul chez lui. Ecrivain en herbe, il prend sa
douche puis son petit-déjeuner et commence à écrire sur son
ordinateur. Il est tranquille et concentré avec son petit air
sérieux et son regard dans le vide. En parallèle à la présentation
sommaire mais suffisante d'Eugenio, Hawaii
décrit le parcours de Martin dans cette ville. Blond, légèrement
plus juvénile, Martin cherchait à retrouver une amie d'enfance, qui
depuis a déménagé.
Il
squatte pauvrement dans une maison en ruine, abandonnée et où la
nature à repris ses droits. Martin sonne de maison en maison,
propose ses services pour faire quelques travaux en échange d'un
sandwich. Le soir, il rentre dans sa ruine, la journée il se lave
rudimentairement à un robinet et va un jour frapper au portail de la
propriété d'Eugenio. Assez vite, avec un large sourire, Martin se
rend compte qu'ils se connaissaient quand ils étaient enfants.
Eugenio,
qui lui rend son sourire, veut bien embaucher Martin, il y a des
choses à faire : ranger des tuiles, nettoyer la piscine,
réparer les gouttières. L'un écrit dans le jardin, l'autre sue à
grosses gouttes, mais chacun se retrouve dans la semi nudité (ben
ouais, c'est l'été). Ils déjeunent ensemble, Eugenio prépare un
maté à Martin, ils ne se disent que des choses bien banales, ils
n'ont pour l'instant que des rapports d'employeur à employé, mais
des rapports décontractés.
Martin
demande à prendre une douche et le soir, après le travail, Eugenio
le ramène en voiture. Martin prétend habiter chez une de ses
tantes. On ne saura jamais vraiment si ce qu'il raconte sur sa venue
dans ce village, sur son passé, sur la maison familiale où il ne
peut pas habiter, est vrai. Marco Berger entretient le mystère, il
procède tout autant avec Eugenio dont on ne connaîtra que des
bribes de son passé. Le film est entièrement tourné vers le
présent.
Un
soir, Martin avoue enfin qu'il vit dans cette ruine et Eugenio
l'installe dans l'atelier. Il dormira dans un petit lit. Les moments
de pause entre chaque travail deviendront plus longs. Ils commencent
à discuter, à se baigner dans la piscine ou dans la rivière. Des
souvenirs communs jaillissent, Martin se souvient de diapos que les
parents d'Eugenio avaient faites lors d'un voyage à Hawaii, et
surtout celle de deux ananas au milieu d'une plantation.
Evidemment,
le spectateur aguerri, surtout s'il a vu les deux autres films de
Marco Berger, sait que ces deux hommes sont pris dans les
ravissements du désir. Ce qui est beau dans Hawaii
est la manière douce de mettre en scène la montée irrésistible de
cette tension sexuelle. Au fur et à mesure de leur intimité, les
gestes se délient, les visages se rapprochent, la sensualité de
leur corps s'épanouit dans un lent et sobre crescendo, sans coup de
théâtre ni déchirement brutal ni dialogue et musique superflus. Un
joli conte d'été.
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